Parfois les soirs d'automne, j'aime à cheminer solitaire, au bord des champs meutris par les sillons. Je laisse le soleil blême de novembre caresser mon front moite, et mon âme, alors, se plait à vagabonder chez vous, ravissantes locataires du Mont Olympe, Muses que j'aime à taquiner.
Oui, j'en conviens, à moi aussi, tel mon ancêtre Piron, il m'arrive d'être metromane.
Voici le fruit de mon inspiration, que je vous livre, fidèles lecteurs.
Si ma prose a su parfois vous plaire, qu'en sera-il de mes vers ?
Pour commencer je voudrais vous montrer une oeuvre que j'ai composée en l'hommage de mon maitre, mentor et avatar, j'ai nommé Charles le Téméraire, dans un style assez particulier, et je crois fort original (même si j'ai opté pour un forme classique en respectant rigoureussement les contraintes du sonnet et de l'alexandrin) :
SONNET CHRONOLOGIQUE A CHARLES LE TEMERAIRE

Charles le Téméraire, vigoureux athlète,
Tombé en 1477,
Toi qui naquis en 1433
Je te dédie ces vers, toi qui fus plus que roi.
Je veux chanter ton mariage, digne d'Hécate,
Qui eut lieu en 1454
Et ton courage, ô toi qui mis la Flandre à feu,
Et à sang en 1452
Et attaquas Paris, sans qu'hélas tu la vainques
En octobre 1465
Héroïque et grand, tu conquis la Gueldre, à l'aise,
En juillet-aout 1473
Mais péris à Nancy, le (ô mort de poète)
5 janvier 1477.
Alors qu'en pensez vous ? Je crois sans me vanter être parvenu dans cette oeuvre à mêler la force du sentiment avec une rigoureuse exactitude chronologique, ce qui rend ce poème tout à la fois émouvant et instructif.
Le poème suivant est du même tonneau, mais traite d'un sujet bien différent, je le soumets sans un plus long préambule à votre jugement :
HYMNE GEOLOGIQUE A LA BOURGOGNE
Ton Nord et ton Ouest, ô Bourgogne solitaire
Se forment de longues plaines sédimentaires.
A l'est se cultivent des blés sous le ciel bleu
Et des almes oléoprotéagineux.
Ton centre est un plateau fait de roches calcaires
Où le paysan peine à labourer la terre
On y voit le Morvan incisé par la mince
Dépression houillère de la Dheune-Bourbince.
Mériodionalement gît le doux Maconnais
Dont la polyculture est un divin bienfait.
Je t'aime ô Bourgogne dans ta géologie
Dans tes calcaires et marnes du jurassi-
-que inférieur et jusque dans tes conglomérats
De grès, de chistes, du lias et du trias !

Là encore, je n'aime pas me vanter, mais je suis bien obligé de heurter ma naturelle modestie en prétendant que ce sont là les vers les plus suaves jamais rédigés sur la géologie bourguignonne, laquelle n'a pas démérité mes hommages.
Mon seul regret est qu'un sonnet ne soit formé que de 14 vers, ce qui ne m'a pas laissé la place suffisante pour célèbrer le néoprotérozoique, dont pourtant je raffole.
Enfin voici ce que je n'hésite à appeler mon chef d'oeuvre. Il m'a fallu de nombreuses nuits pour la composer, passées sous les étoiles à quêter du clair de lune l'inspiration et les rimes, et la lune magnanime, m'a exaucé, comme vous pourrez en juger, en lisant ce :
SONNET POUR LA BOURGOGNE LIBRE
J'ai grandi en têtant ton sein ô ma Bourgogne
Qui m'imbiba bambin, biberon pour ivrogne.
Tu m'as donné ton vin et j'en ai fait de l'art
Et des rêves ardents et des peaux de renard.
Mais tu vis dans les fers, esclave infortunée
D'un pays moins que bas, d'un peuple d'arriérés
De mangeurs de crapauds et de buveurs d'eau plate
Au foie tristement sain, à l'immobile rate.
Mais l'avenir s'éclaire, un mouvement est né
Et déjà ta prison commence à s'effondrer.
Hourrah ! Libérons nous ! Chevauchons les étoiles !
Buvons ! Foutons ! Joie des gosiers ! Plaisir anal !
Et dansons sur la lune en jubilant d'être ivre
Aux cris puissants de : Vive la Bourgogne Libre !

Et vive la poésie bourguignonne !